26/11/2024

Au village de Roche

                                                                     

Au village de Roche


J’ai retrouvé le val du dormeur de Rimbaud,

En témoigne toujours l’herbe tendre couchée

Près de ce vieux lavoir où l’âme effarouchée

Du poète maudit lui creusa le tombeau.   


La rivière n’est plus qu’une petite mare.

Ont fané les glaïeuls depuis bien trop longtemps.

Mais dans les gris reflets de l'eau sale et du temps,

J’ai vu le 'bateau ivre'* arracher son amarre.


Parti dans son ailleurs, plus loin que l’horizon,

S’est laissé déposé, par son délire en prose,

Au lit d’un galetas, tant la douleur s’impose

A vivre en son enfer, le temps d’une saison.


Devant la maison vide où le passé s’accroche,

Le vieux banc se souvient du soir d'une oraison.

En la plaine ardennaise, un jour de fenaison,

J'ai vu Rimbaud flânant au village de Roche.



* titre original de l'oeuvre de Rimbaud ( hiatus volontaire )







16/11/2024

Belle à la fontaine

 ( Rondel )


Belle à la fontaine



Puis-je boire à votre fontaine ?

Sans crainte de votre courroux ?

Puits de Jacob, au rendez-vous,

Se tenait la samaritaine.


Source vive sous la futaine,

Belle dame au parfum si doux,

Puis-je boire à votre fontaine ?

Sans crainte de votre courroux ?


Avant qu’un soldat ne m’enchaîne

Et me pende avec les voyous

Ou qu’en mes mains, plante les clous,

Femme, en votre âme puritaine,

Puis-je boire à votre fontaine ?








13/11/2024

Le fils de novembre

Attentats du 13 novembre 2015 - Bataclan - Paris )


( Classique Régulier )



Le fils de novembre…



Elle garde un sourire aussi doux qu’un printemps

Mais l’hiver dans les yeux et la pluie en dedans

     Quand elle parle seule, adressant aux nuages,     

Pour l’enfant disparu, son amour en messages.


Paris est en novembre et l’automne est si doux

Que la rue est en fête et s’amusent ces fous

Mécréants, assassins qui, brandissant des armes,  

Y sèment la terreur et le sang et les larmes…


Et lui revient toujours ce long cri déchirant

Qu’un Bataclan vomit d’un concert délirant

Lorsqu’au bord du plaisir… le baiser d’une balle

Couche le fils aimé dans la mort qui s’installe…


Profonde est la blessure et si lourde est la croix

Qu’elle supporte encore au pied des marbres froids

Tant son être amputé, depuis cette hécatombe,

L’entraîne vers la nuit du profond de la tombe…


Puisse-t’elle entrevoir, juste avant de partir

L’homme se faire humain puis de paix se vêtir

Pour qu’il fasse à jamais que se taisent les bombes

Et que ne chantent plus que de blanches colombes.




11/11/2024

Pour l'exemple ( quintil )


( Classique Régulier - Quintil )


Poème réalisé ayant pour forme 1-5 -5-1 soit : 1 vers de présentation + 2 strophes de 5 vers ( quintil ) + 1 vers de chute. L'ensemble symbolise les 1551 jours de la 1ère guerre mondiale  pour la France.



1er Prix National de Poésie Mémorielle - Centenaire de 1918

( Fédération Maginot des Anciens Combattants - Section Fédérale de Tours )



Pour l’exemple


Il était le poilu sans honneur et sans gloire…


Ce qu’il voulait surtout, c’était de pouvoir vivre

Loin de cette terreur, de ce front menaçant,

En rampant, s’échapper, sous un tir incessant,

A la mort qui le veut, son relent qui l'enivre…

A cet enfer maudit fait de boue et de sang. 


Mais lorsqu’il fut trouvé, si loin de la mitraille,

L’officier le traita de semeur de pagaille.

Condamné sans procès, on le fit déserteur

Lui, le jeune mutin, sans grade ni médaille.

Mis debout au poteau… tomba l’agitateur…


Fusillé pour l’exemple et proscrit de l’histoire !










 

Pour l'exemple ( sonnet )

 

( Sonnet libéré )


MENTION D'HONNEUR 2018

10ème Concours de Poésie Lire et Ecrire en Gascogne

Castelnau d'Auzan


                                               Aux fusillés de la Grande Guerre,

                                               A tous ces proscrits de l’histoire

                                               Morts pour rien…

 

 Pour l'exemple...


Ce qu'il voulait surtout c'était de quoi survivre

A cet enfer maudit fait de boue et de sang.

En rampant éviter, sous un tir incessant,

Cette mort qui le veut, cette odeur qui l'enivre.

 

Il s’est retrouvé seul, si loin de la mitraille

Quand au ventre la peur lui disait de courir

Pour repousser encor le devoir de mourir

Lui, le jeune soldat, le semeur de pagaille.

 

Lorsque de l’officier, le doigt accusateur,

Se pointa sur son front le nommant déserteur,

Il devint le poilu sans honneur et sans gloire,  

 

 Sans procès ni de grâce, au nom de la nation,  *

   Mis debout au poteau, ce fut l'exécution...    *

Fusillé pour l'exemple et proscrit de l’histoire !

                         

                                                   

( Sonnet libéré ) - * synérèses voulues par l'auteur






08/11/2024

Le Poète trépané


 ( Acrostiche Guillaume Apollinaire )


   Le Poète trépané 

                                   


     Grande sera ta peine au verdict annoncé.

    Un emprisonnement et te voilà coupable !

    Inculpé pour un vol, un délit dénoncé…

    L’amitié bafouée, incident regrettable !

    Au bout de quelques jours et de rimes nouvelles,            

    Un non-lieu prononcé pour un maigre butin...            

    Mais voilà que se font les blessures mortelles…                   

    Entends-tu ces bruits sourds ? C’est le chant du canon.              


    Aux armes citoyens ! Voici la grande guerre !                 

    Préparez vos fusils… une croix pour un nom.   

    Oubliés seront-ils ceux que la mort enterre ?…

    L’obus vient d’éclater… coule à flots tant de sang…     

    L’éclat perce ta chair. La douleur est profonde.     

    Image de la peur sous un tir incessant…                                        

    Ne laissez pas périr cette âme si féconde !                                    

    Ami relève-toi puis va le coeur battant,               

    Il te faut succomber à la beauté des femmes !                   

    Reprends vite ta plume, une rousse t’attend…                 

    Et laisse nous tes mots, tes vers en calligrammes.