Au village de Roche
J’ai retrouvé le val du dormeur de Rimbaud,
En témoigne toujours l’herbe tendre couchée
Près de ce vieux lavoir où l’âme effarouchée
Du poète maudit lui creusa le tombeau.
La rivière n’est plus qu’une petite mare.
Ont fané les glaïeuls depuis bien trop longtemps.
Mais dans les gris reflets de l'eau sale et du temps,
J’ai vu le 'bateau ivre'* arracher son amarre.
Parti dans son ailleurs, plus loin que l’horizon,
S’est laissé déposé, par son délire en prose,
Au lit d’un galetas, tant la douleur s’impose
A vivre en son enfer, le temps d’une saison.
Devant la maison vide où le passé s’accroche,
Le vieux banc se souvient du soir d'une oraison.
En la plaine ardennaise, un jour de fenaison,
J'ai vu Rimbaud flânant au village de Roche.
* titre original de l'oeuvre de Rimbaud ( hiatus volontaire )