04/11/2024

En non conformité


Prix du Conseil départemental 2020 - Le Jasmin d’Argent - Agen

   1er Prix Jean Boulan 2020 - La Saintonge et d’Aunis - Saintes


En non-conformité



Chaque jour faire face au regard de la rue.

Insultes et coups bas sur leur intimité,

Exister en étant en non-conformité,

Pour eux le piloris, c’est la peine encourue…


Il est parti ce soir pour ne plus revenir

Emportant avec lui ses vingt ans de souffrance

Pour ce corps qui n’est plus qu’une fausse apparence

Et qui brise en son coeur ses rêves d’avenir.


Il s’en va loin des siens pour vivre la naissance

D’un être différent, d’une autre identité,

Puis découvrir enfin sa vierge nudité    

Jusqu’à l’apprivoiser, faire sa connaissance…


Et le temps passera, lentement, doucement,

Effaçant pour toujours les blessures de l’âme.

Au miroir de la vie un sourire de femme

Brillera de soleil au bleu du firmament.


Puis un jour dans le nid, une belle hirondelle

Reviendra se poser, ramenant du bonheur…

Mon enfant, mon enfant ! Pose-toi sur mon coeur !

Qu’importe que tu sois… jeune homme ou demoiselle.









28/10/2024

Celui que l'on ne voulait pas


                      1er Prix Poésie Classique 2024 
                  Arts et Lettres de France - Bordeaux



Celui que l’on ne voulait pas



Si loin de son troupeau, dans la nuit angoissante,

Sans lui laisser le temps de sentir le danger,

Sur elle il a bondi, pauvre proie impuissante

Qui déjà n’entend plus l’appel de son berger.


Monte alors vers le ciel le cri du solitaire,

De la bête affamée appelant tous les siens,

Hurlement qui fait peur du prédateur mystère,

Que s’enferment les gens et se cachent les chiens.


Mais au petit matin, de dessous la rosée   

Furent trouvés, hélas,  les restes d'un repas. 

Mais qui a fait ce mal ? Question fut posée.  

Serait-ce donc ce loup que l'on ne voulait pas ?


Et gronde la révolte, elle est là, populaire.

La guerre est déclarée au tueur sans remords !

Que sortent les fusils et les cris de colère,

Assez de ces horreurs, de ce sang, de ces morts !


On le chercha partout… la traque fut intense…

Le coyote malin, loin de ces tirailleurs,

Etait depuis longtemps en quête de pitance

Dans une autre contrée… un alléchant ailleurs !…


Les fusils sont rangés, la paix est revenue.

Au pré sont les moutons, plus cléments sont les cieux.

Le berger assoupi rêve d’une ingénue…

Derrière les buissons, pétillent deux grands yeux…









27/10/2024

Au village de Roche


                                                             Au village de Roche


J’ai retrouvé le val du dormeur de Rimbaud,

En témoigne toujours l’herbe tendre couchée

Près de ce vieux lavoir où l’âme effarouchée

Du poète maudit lui creusa le tombeau.   


La rivière n’est plus qu’une petite mare.

Ont fané les glaïeuls depuis bien trop longtemps.

Mais dans les gris reflets de l'eau sale et du temps,

J’ai vu le 'bateau ivre'* arracher son amarre.


Parti dans son ailleurs, plus loin que l’horizon,

S’est laissé déposé, par son délire en prose,

Au lit d’un galetas, tant la douleur s’impose

A vivre en son enfer, le temps d’une saison.


Devant la maison vide où le passé s’accroche,

Le vieux banc se souvient du soir d'une oraison.

En la plaine ardennaise, un jour de fenaison,

J'ai vu Rimbaud flânant au village de Roche.



* titre original de l'oeuvre de Rimbaud ( hiatus volontaire )